« Avoir son mot à dire », débats littéraires à hauteur d’enfants

Tout au long du printemps 2022, un groupe d’enfants, certains accompagnés par la SEES Roland Champagnat, d’autres par le SSEFS Recteur Louis (deux structures de la plateforme surdité de la Fondation OVE), s’est réuni pour partager points de vue et expériences sur les possibilités d’expression, les différentes formes de langage, et les difficultés qu’on rencontre pour dire et oser dire.

Le premier rendez-vous a pris place au Collège du Tonkin de Villeurbanne, établissement de scolarisation pour certains des participants. L’objectif : se découvrir, se présenter, chacun.e avec ses mots et surtout avec un objet qui parle de soi. Bernard Nolly, directeur des Francas du Rhône, a animé ce petit débat et choisi le concernant, un objet bien particulier pour témoigner : un micro, outil parfait pour amorcer l’échange avec les enfants sur ce qui permet de s’exprimer.

Le second rendez-vous avait pour cadre la Biennale des langues, et pour objectif la découverte du livre jeunesse par le biais de deux albums lus par Mara Denis, bibliothécaire habituée à partager des histoires à bord de son bibliobus. Celles choisies pour l’occasion racontaient chacune à leur manière une affaire d’« expression libre » et de confrontations d’idées. Les enfants ont pu apporter leur point de vue, mais aussi partager leurs goûts pour certaines aventures littéraires. Et le panel était large, des mangas à Harry Potter, en passant par des histoires de « révolution » ou de contes à dormir debout.

Quand tu lis un livre le soir, comme ça, tu pars après dans un rêve, tu imagines !

Pour la dernière séance, les enfants ont pu faire connaissance avec un auteur en chair et en os : Rémi Courgeon. La petite assemblée se réunit pour l’occasion dans les salons d’une « belle et grande maison » dédiée à la littérature : la Villa Gillet, qui s’apprêtait tout juste à ouvrir son festival jeunesse Kaléidoscope. A partir des plus belles pages de son dernier ouvrage, projetées en « avant-première », Rémi et les enfants discutèrent à bâtons rompus sur le métier d’illustrateur, ses outils de travail, et les histoires qui lui tiennent à cœur. Il fit même la démonstration de son talent en improvisant quelques crayonnés « magiques », sous les yeux ébahis du jeune auditoire.

Cette lecture de l’album « Ta peau contre la mienne » a été un très beau moment de partage, allant bien au delà d’une simple traduction en langue des signes (…) Tous ont pu s’exprimer à tour de rôle, du plus expansif au plus réservé, réagissant tant aux images projetées qu’aux idées développées dans le texte (…) Si l’apprentissage des mots peut être difficile, leur œil comprends vite.

L’idée tout au long du parcours était finalement de vivre une expérience de débat « à hauteur d’enfants » : appréhender l’espace et les règles que ça suppose, le temps qu’il faut savoir se donner pour échanger, écouter, mais aussi traduire. Car si certains parlaient le français, d’autres signaient. Il fallait donc s’associer les talents d’une complice aguerrie à l’exercice de traduire et interpréter : Marie-Madeleine, qui sut donner corps aux paroles des uns, et paroles aux signes des autres, déjouer les « implicites », simplifier tout en gardant l’essence des mots et leur poésie.

Et au-delà du débat, ce fut surtout une histoire de rencontres et de découvertes : avec des lieux, et avec des personnes inconnues devenues « amies » depuis, au fil de ces échanges et balades entre Lyon et Villeurbanne.

Projet inscrit dans le cadre de « Villeurbanne – Capitale française de la culture » pour l’année 2022, label piloté et financé par le Ministère de la Culture avec le soutien de la Caisse des Dépôts.

© Bertrand Gaudillère, Villa Gillet ; Fondation OVE